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Remarquant que ces espérances messianiques sont conçues d’après le type juif, on prétend que le récit fut rédigé ou du moins fixé avant la mort de Jésus ; mais le type juif de ces espérances persista encore après lui (Actes des apôtres, 1, 6)[1]. Surtout il faut tomber d’accord, avec Schleiermacher, que rien n’est moins possible que de regarder ces discours comme strictement historiques, et de soutenir que Zacharie, au moment où il reprit l’usage de la parole, s’en servit pour prononcer le cantique en question, sans être interrompu par la joie et l’étonnement de l’assemblée, sentiments par lesquels le narrateur lui-même se laisse interrompre. Dans tous les cas, ajoute Schleiermacher, il faut admettre qu’ici l’auteur a ajouté du sien, et qu’il a enrichi le récit historique avec les effusions lyriques de sa muse[2] ; car, lorsque Kuinœl suppose que Zacharie composa et écrivit postérieurement le cantique, cette supposition, outre qu’elle est singulière, contredit trop le texte. Enfin les interprètes invoquent encore certains autres traits qui font tableau, et qui, disent-ils, n’auraient jamais pu être inventés par un narrateur ; tels sont : le signe interrogatif adressé à Zacharie, le débat de la famille, et la situation de l’ange justement à la droite de l’autel[3]. Mais ils montrent seulement par là qu’ils n’ont aucune idée de la poésie et de la légende populaire, ou qu’ils n’en veulent pas avoir ici ; car la vraie poésie et la vraie légende se distinguent justement par le caractère naturel et frappant des traits particuliers[4].


  1. Comparez De Wette, Exeget. Handbuch, 1, 2, S. 9.
  2. Ueber die Schriften des Lucas, S. 3.
  3. Paulus et Olshausen, sur ce passage ; Heydenreich, l. c., 1, S. 87.
  4. Comparez Horst, dans Henke’s Museum, 1, 4, S. 705 ; Hase, L. J., § 35 ; Vater, Comm. zum Pentateuch, 3, S. 597 ; George, S. 33, 91.