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tervalle de temps écoulé entre la naissance de Jean-Baptiste et la rédaction de l’évangile de Luc[1]. Mais d’après ce qui a été remarqué dans l’Introduction, retournant la question, nous demanderons à cet interprète comment il veut faire comprendre que, pour un homme aussi célébre que Jean, et dans un temps aussi agité, on ait pu, au moins soixante ans après, rédiger le récit de sa naissance avec une précision de détails encore authentiques. À cela Paulus a une réponse toute prête, réponse approuvée aussi par d’autres (Heydenreich, Olshausen), à savoir, que, probablement, le morceau intercalé par Luc, 1, 5-2, 39, a été une notice de famille qui circulait dans la parenté de Jean-Baptiste et de Jésus, et qui avait vraisemblablement Zacharie pour auteur[2]. C’est là une hypothèse en l’air, inventée par les modernes, et l’on n’a pas besoin d’y opposer, avec K. Ch. L. Schmidt, qu’un récit aussi défiguré (nous dirions simplement : aussi embelli) n’a pu être une notice de famille, et que, s’il ne faut pas le ranger complètement dans la classe des légendes, cependant il n’est plus possible d’y distinguer le fond historique, en cas qu’il y en ait un[3]. On va plus loin : on assure que dans le récit même se trouvent des traits qu’aucun poëte n’aurait imaginés, et qui prouvent par conséquent que ce récit est une reproduction immédiate du fait ; comme signe principalement caractéristique, on dit que les espérances messianiques des divers personnages que Luc fait parler 1 et 2, répondent exactement à la situation et aux relations de chacun d’eux[4]. Mais ces différences ne sont nullement aussi tranchées que le prétend Paulus, ce qui les caractérise, c’est plutôt d’aller en se particularisant davantage ; et cette marche du général au particulier est naturelle aussi chez un poëte ou dans une légende populaire.

  1. L. c., S. 72 f.
  2. L. c., S. 69.
  3. Dans Schmidt’s Bibliothek für Kritik und Exegese, 3, 1, S. 119.
  4. Paulus, l. c.