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rougissent pas aujourd’hui de compter l’excitation produite par cette punition parmi les causes qui mirent Zacharie en état de procréer un fils ; singulière escapade du supranaturalisme sur le terrain du naturalisme.

D’ailleurs, quelque digne d’un être divin qu’eût été la conduite de l’ange qui se montre à Zacharie, une apparition angélique n’en aurait pas moins, de notre temps, paru, comme telle, incroyable à plusieurs. L’auteur de la Mythologie hébraïque a posé expressément le principe : que là où sont des apparitions angéliques est un mythe, aussi bien dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament[1]. Supposé même qu’il y ait des anges, ils ne peuvent pas néanmoins, pense-t-on, se faire voir aux hommes ; car ils appartiennent au monde des esprits, qui ne peut exercer d’action sur nos sens ; de sorte qu’il est toujours judicieux de rapporter leurs prétendues apparitions à la simple imagination[2]. Il n’est pas vraisemblable, ajoute-t-on, que Dieu les emploie comme on se le figure ordinairement ; car on ne peut reconnaître aucun but raisonnable à leur mission ; ils ne servent communément qu’à satisfaire la curiosité, et, de plus, leur intervention détournerait les hommes du soin de diriger leur vie par eux-mêmes[3]. Il est singulier aussi que ces êtres se soient montrés agissants dans l’ancien monde pour les moindres occasions, tandis que, au milieu du monde moderne, ils restent oisifs, même dans les conjonctures les plus importantes[4].

Non seulement leur apparition et leur intervention dans l’humanité, mais encore leur existence a été révoquée en doute, parce que le but principal de leur existence devrait se trouver dans ces fonctions mêmes (Hebr., 1, 14). À la vérité, dit Schleiermacher[5], on ne peut pas prouver l’im-

  1. Hebr. Mythol., 2, S. 218.
  2. Bauer, Hebr. Mythol., 1, S. 129 ; Paulus, Exeget. Handbuch, 1, a, 74.
  3. Paulus, Commentar, 1, S. 12.
  4. Bauer, Hebr. Mythol., 1, S. 120.
  5. Glaubenslehre, 1. Thl., § 42 und 43. 2te Ausgabe.