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Pour quiconque jette un regard curieux et attentif sur le présent et le passé, un tel contraste suscite immédiatement la plus grave des questions que l’histoire puisse offrir aux méditations. Tandis que le présent nie ainsi sans retour le miracle, le passé en est tout imprégné. Les théologies, à quelque moment qu’on les prenne dans les époques antiques, sont la clef de voûte de la société. À la vérité, chez des peuplades absolument sauvages, les notions surnaturelles sont loin de remplir un office considérable, et même on assure qu’il est des tribus tellement misérables matériellement et intellectuellement que toute idée religieuse leur est étrangère, n’étant jamais parvenues à une réflexion suffisante pour s’interroger et se faire une réponse sur les phénomènes qui les entourent ; toutefois le fétiche des nègres, le tabou des populations océaniennes, le manitou des peaux rouges dans la Nord-Amérique, et les hommes supposés en relation avec les êtres surnaturels commencent à prendre une part dans l’existence commune. Mais c’est dans l’âge suivant et quand le polythéisme est définitivement sorti vainqueur de ces dieux inférieurs et grossiers, que la théologie, que la théocratie, que le sacerdoce arrivent à une influence souveraine, la religion saisissant enfin le rôle qu’elle ne doit plus quitter pour l’amélioration morale, c’est-à-dire pour la plus importante des améliorations. On n’a qu’à se représenter le polythéisme égyptien, assyrien, grec et romain, celui de l’Inde avec le bouddhisme qui en provient, le monothéisme judaïque, le di-théisme de Zoroastre et de la Perse, on n’a qu’à se rappeler les institutions sorties de cet ordre d’idées, les temples érigés, les fêtes solennelles et la consécration générale qui en émanait pour la vie publique et privée, et l’on recon-