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Une application aussi incomplète de l’idée du mythe à l’histoire de la vie de Jésus est entachée d’insuffisance et d’inconséquence, défauts que s’est efforcé de rendre palpables l’auteur, déjà plusieurs lois cité, de la Dissertation sur les différentes considérations avec lesquelles et pour lesquelles le biographe de Jésus peut travailler[1]. Considérer le récit évangélique en partie comme une pure histoire, en partie comme un mythe, c’est confondre les deux points de vue, et cette confusion est le fait de ces théologiens qui, ne voulant ni sacrifier l’histoire ni s’en tenir à de clairs résultats, ont espéré réunir les deux partis dans ce moyen terme ; vains efforts que le supranaturaliste sévère taxera d’hérésie, et dont se rira le rationaliste. Ces médiateurs, observe l’auteur, en prétendant faire comprendre une chose pourvu qu’elle soit possible, s’attirent tous les reproches qu’on adresse avec raison à l’explication naturelle ; et, en accordant encore une place au mythe, ils prêtent complètement le flanc à l’accusation d’inconséquence, la pire des accusations contre un savant. Au surplus, le procédé de ces éclectiques est tout ce qu’il y a de plus arbitraire : c’est, la plupart du temps, d’après leurs propres impressions qu’ils décident ce qui doit appartenir à l’histoire, et ce qui doit appartenir au mythe ; de pareilles distinctions sont également étrangères aux auteurs évangéliques, à la logique, et à la critique historique qui en dépend. Appliquer l’idée du mythe à l’ensemble de l’histoire de la vie de Jésus, y reconnaître, dispersés partout, des récits ou au moins des ornements mythiques, telle est la doctrine de cet écrivain, qui range dans la catégorie des mythes non seulement les relations des miracles de l’enfance de Jésus, mais encore celles de sa vie publique, non seulement les miracles opérés en lui, mais encore les miracles opérés par lui.

L’application la plus étendue de l’idée du mythe philo-

  1. Dans Bertholdt’s Krit. Journal, 5. B., S. 243.