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teur a conçu la chose, quand bien même le fait raconté serait impossible. Au contraire, celui qui poursuit l’explication matérielle ou physique est amené à des tours de force qui, lui faisant perdre de vue le sens primitif des narrateurs, y substituent tout autre chose que ce qu’ils ont pu ou voulu dire.

De la même façon, Gabler[1] recommande le point de vue mythique comme le meilleur moyen d’échapper aux explications prétendues naturelles et si forcées, qui étaient devenues une mode pour l’histoire biblique[2]. L’auteur d’explications naturelles, observe-t-il, veut ordinairement rendre naturelle toute l’explication, et, comme cela n’est possible que rarement, il se permet les opérations les plus violentes, qui ont décrié la nouvelle exégèse même parmi les laïques. Mais au point de vue mythique on n’a besoin d’aucun tour de force, car la plus grande partie d’un récit appartient souvent au mythe, et le fait qui lui sert de noyau reste quelquefois très petit, quand on en a enlevé les enveloppes merveilleuses qui y ont été tardivement ajoutées.

Horst ne put pas non plus donner son assentiment à un procédé atomistique qui, dans les récits miraculeux de la Bible, extrayait des particularités isolées comme non historiques, et les remplaçait par des particularités naturelles, au lieu de reconnaître, dans l’ensemble de ces récits, un mythe religieux et moral où une idée quelconque est représentée[3].

  1. Dans un mémoire sur cette question : Est-il permis d’admettre des mythes dans la Bible et même dans le Nouveau Testament ? Ce mémoire fut composé à l’occasion d’un examen de la Mythologie hébraïque de Bauer ; il parut dans Journal für auserlesene theol. Literatur, 2. Band, 1tes Heft, S. 43 ff.
  2. Hoffmann (S. 51 f. 58 ; est ridicule quand il essaie de déshonorer l’origine du point de vue mythique en observant que les premiers pas dans cette voie ont été imposés aux exégètes par la nécessité et l’embarras. Qu’est-ce donc que le mouvement progressif dans la vie comme dans la science, sinon la nécessité, l’embarras, la contradiction, si bien qu’il n’y a pas à s’arrêter sur le dernier degré de l’échelle et qu’il faut monter à un échelon supérieur ?
  3. Sur les deux premiers chapitres de Luc, dans Henkes Museum, 1, 4, S. 695 ff.