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l'Océan, et qui semblent former la bordure extrême de la terre habitée, il conclut que, par analogie, on doit concevoir au delà de l'Océan l'existence d'autres Éthiopiens, occupant par rapport aux différents peuples de cette seconde zone tempérée et sur les bords dudit Océan la même situation extrême. Et de la sorte, ajoute t-il, il y a bien effectivement deux nations d'Éthiopiens séparées l'une de l'autre par l'Océan. Pour expliquer maintenant l'addition de ce second vers,

« A la fois au couchant et au levant, »

il fait remarquer que, comme le zodiaque céleste est toujours directement placé au-dessus du zodiaque terrestre, et que celui-ci, dans son obliquité, ne dépasse jamais l'une ou l'autre Éthiopie, il faut nécessairement aussi concevoir que le soleil accomplit sa révolution tout entière dans l'intervalle céleste correspondant aux mêmes limites, s'y levant et s'y couchant en différents points et avec des apparences diverses pour les différents peuples. Telle est l'explication que propose Cratès, et qu'il juge la plus conforme aux principes astronomiques; mais il aurait pu dire plus simplement, sans abandonner pour cela sa thèse sur le fait même de la division des Éthiopiens en deux nations, que les Éthiopiens s'étendent du levant au couchant, et habitent tout le long de l'Océan sur l'un et l'autre rivages. Et alors qu'importe, pour le sens, qu'on lise le vers en question tel que Cratès le donne, ou comme l'écrit Aristarque,

« L'une au couchant, l'autre au levant, »

ce qui revient bien à dire que les Éthiopiens habitent tant au couchant qu'au levant des deux côtés de l'Océan? Aristarque, lui, rejette l'explication de Cratès et veut que cette division en deux nations distinctes se soit, dans la pensée d'Homère, appliquée uniquement aux Éthiopiens de notre hémisphère, à ceux-là même, qui, pour nous autres Grecs, représentent l'extrémité méridionale de la terre; et comme €n fait cette division n'existe pas, qu'il n'y a point là deux Éthiopies,