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de deux auteurs, s’accordant l’un et l’autre à attribuer à l’Inde une largeur de 20000 stades, qu’il a réduit cette largeur à 12000. »

8. Mais à cela nous répondrons qu’Ératosthène n’a pas condamné Patrocle sur le seul fait de son désaccord avec Mégasthène et qu’il avait dû préalablement comparer son dire avec le témoignage concordant et véridique de l’auteur du stadiasme en question. Or, y a-t-il lieu de s’étonner qu’un témoignage, d’ailleurs digne de confiance, soit effacé par un autre encore plus digne de foi, et que nous abandonnions en certains cas telle autorité que nous avons suivie dans d’autres, quand nous trouvons ailleurs un élément de certitude plus grande ? Sans compter qu’il y a quelque chose de ridicule à croire que, plus le désaccord est grand, plus la défiance doit être grande aussi; le contraire même paraît plus vrai, et il semble qu’un léger désaccord autorise toujours plus le soupçon d’erreur : sur un détail de mince importance, non-seulement le premier venu, mais celui-là même qui est plus éclairé que les autres, a plus de chance de se tromper, tandis que sur une question importante, où le premier venu se trompera aisément, l’homme instruit risquera beaucoup moins de le faire et devra trouver plus facilement créance.

9. Nous ferons remarquer d’autre part que, s’il est vrai, en thèse générale, que les auteurs ayant écrit sur l’Inde n’ont fait la plupart du temps que mentir, Déimaque les surpasse tous à cet égard, et que Mégasthène vient tout de suite après lui. Chez Onésicrite, ainsi que chez Néarque et les autres historiens du même temps, on sentait déjà les premiers bégayements du mensonge[1] : nous l’avons vu, de reste, en écrivant l’histoire d’Alexandre. Mais c’est de Déimaque et de Mégasthène sans comparaison qu’il importe de se défier le plus. Ce sont eux, en effet, qui ont parlé des Enotocètes, des Astomes, des Arrhines, des Monophthalmes,

  1. Coray ponctuait différemment la phrase, ce qui change quelque peu le sens : τοιοῦτοι παραψελλίζοντες. Ηδη δί καὶ ἡμῖν, etc., au lieu de παραψελλίζοντες ήδη. Καὶ ἡμῖν δ’ ὑπήρξεν etc.