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est une idée fixe, un dogme : pensée et critique ne pourraient donc sortir que d’un dogme, c’est-à-dire d’une pensée, d’une idée fixe, d’une hypothèse.

Par là nous en revenons à ce qui a été dit plus haut : le christianisme consiste dans le développement d’un monde de pensées, ou bien, il est « la liberté de penser » proprement dite, la « libre pensée », le « libre esprit ». La « vraie » critique, que je nommais « tributaire » est identique à la « libre » critique, car elle n’est pas la mienne propre.

Il en va autrement quand ce qui est tien n’est pas transformé en chose en soi, personnifiée, identifiée à un « esprit propre ». Ta pensée n’a pas « la pensée » pour hypothèse, mais toi. Mais alors tu te supposes ? — Oui, mais non pour moi, pour ma pensée Je suis, avant que de penser. Il s’ensuit qu’une pensée ne précède pas ma cogitation, ou que ma pensée est, sans « hypothèse ». Car l’hypothèse que Je suis pour ma pensée n’est pas faite par la pensée, n’est pas pensée, elle est la pensée même posée, elle est le propriétaire même de la pensée et prouve seulement que la pensée n’est rien de plus que propriété, c’est-à-dire qu’une « pensée indépendante », un « esprit pensant » n’existe pas.

Ce renversement des considérations ordinaires pourrait sembler un jeu frivole d’obstruction, si bien que ceux mêmes contre qui il est dirigé se laisseraient prendre sans défiance à son allure innocente, s’il ne s’y rattachait des conséquences pratiques.

Pour donner à ces conséquences une expression concluante, on affirme maintenant que ce n’est pas l’homme mais le moi qui est la mesure de tout. Le critique « tributaire » a devant les yeux un autre être, une idée qu’il veut servir ; c’est pourquoi il n’immole