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notre position dans le monde, car lui, le médiateur s’entremet pour arranger notre vie sociale qui ne peut être autre qu’« humaine » ; finalement nous recevons de lui en fief propre notre propre valeur en tout ce que nous valons, car nous ne valons rien quand il n’habite pas en nous, quand et partout où nous ne sommes pas « humains ». — La puissance est à l’Homme, le monde est à l’Homme, j’appartiens à l’Homme. Mais comment ne m’est-il pas permis de M’annoncer le suzerain, le médiateur, de Me déclarer mon moi propre ! Car alors je dirai :

Ma puissance est ma propriété.

Ma puissance me donne ma propriété.

Je suis moi-même ma puissance et je suis par elle ma propriété.


1. — MA PUISSANCE


Le droit est l’esprit de la société. Si la société a une volonté, cette volonté est précisément le droit : elle ne subsiste que par le droit. Mais comme elle ne subsiste que parce qu’elle exerce une souveraineté sur les individus, le droit est sa volonté souveraine. Aristote dit que la justice est le fruit de la société.

Tout droit existant est droit étranger, c’est un droit qu’on me « donne », qu’on me « fait ». Aurais-je donc droit, si tout le monde me donnait droit. Et cependant qu’est-ce, ce droit que j’obtiens dans l’État, dans la société, sinon un droit qui m’est conféré par des étrangers. Si un imbécile me fait droit, mon droit m’inspire de la défiance ; sa justice m’est insupportable. Mais aussi quand un sage me fait droit, je n’ai pas