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exhortations isolées, parce qu’examinées rationnellement, à la lumière de sa propre raison, on les reconnaît pour déraisonnables, plus on est attaché par la conscience à la piété filiale, à l’amour de la famille, et plus difficilement aussi on pèche contre la conception que l’on s’est faite de l’amour de la famille et des devoirs de la piété filiale. On ne devient indépendant de la famille existante que pour dépendre plus étroitement de l’idée de famille. Prise au sens déterminé du couple formé par Hans et Gretchen, etc., la famille a perdu son caractère de souveraineté, mais elle n’est qu’intériorisée, elle conserve son vieux sens de famille auquel s’applique le vieux proverbe : On doit plus obéissance à Dieu qu’à l’homme, ce qui veut dire : je ne puis me soumettre à vos exigences stupides ; mais en tant que « Famille » vous restez l’objet de mon amour et de ma sollicitude ; car la « Famille » est une idée sainte à laquelle l’individu ne doit pas porter atteinte. Et cette famille, intériorisée, dématérialisée, devenue une pensée, un concept, c’est maintenant l’ « idée sainte », son despotisme est dix fois pire qu’antérieurement, parce qu’il gronde dans ma conscience. Ce despotisme ne peut être brisé que lorsque le concept de famille devient pour moi un Néant. Les paroles du Christ « Femme qu’ai-je à faire avec toi ? » « Je suis venu pour soulever le fils contre son père, la fille contre sa mère, » et d’autres du même goût, sont accompagnées du renvoi à la famille céleste ou famille proprement dite et ont la même signification que l’exigence de l’État enjoignant en cas de conflit entre lui et la famille, d’obéir à ses ordres.

Il en est de la moralité comme de la famille. Plus d’un qui se dit affranchi de la contrainte des mœurs est