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Les possessions diaboliques ne sont point les seules : si le Diable nous tire par une manche, Dieu nous tire par l’autre ; d’un côté la « tentation », de l’autre la « grâce » ; mais quelle que soit celle qui opère, les possédés n’en sont pas moins acharnés dans leur opinion.

« Possession » vous déplaît ? Dites obsession, ou, puisque c’est l’Esprit qui vous possède et qui vous suggère tout, dites inspiration, enthousiasme. J’ajoute que l’enthousiasme, dans sa plénitude, car il ne peut être question de faux, de demi-enthousiasme, s’appelle — fanatisme.

Le fanatisme est spécialement propre aux gens cultivés, car la culture d’un homme est en raison de l’intérêt qu’il attache aux choses de l’esprit, et cet intérêt spirituel s’il est fort et vivace, n’est et ne peut être que fanatisme ; c’est, un intérêt fanatique pour ce qui est sacré (fanum).

Observez nos libéraux, lisez certains de nos journaux saxons, et écoutez ce que dit Schlosser  : « La société d’Holbach ourdit un complot formel contre la doctrine traditionnelle et l’ordre établi, et ses membres mettaient dans leur incrédulité autant de fanatisme que moines et curés, jésuites, piétistes et méthodistes ont coutume d’en mettre au service de leur piété machinale et de leur foi littérale. »

Examinez la façon dont se comporte aujourd’hui un homme « moral », qui pense en avoir bien fini avec Dieu, et qui rejette le Christianisme comme une guenille usée. Demandez-lui s’il lui est déjà arrivé de mettre en doute que les rapports charnels entre frère et sœur soient un inceste, que la monogamie soit la vraie loi du mariage, que la piété soit un devoir sacré, etc. Vous le verrez saisi d’une vertueuse horreur à cette idée qu’on pourrait traiter sa sœur