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I

une vie d’homme


Dès l’instant où il ouvre les yeux à la lumière, l’homme cherche à se dégager et à se conquérir au milieu du chaos où il roule confondu avec le reste du monde. Mais tout ce que touche l’enfant se rebelle contre ses tentatives et affirme son indépendance. Chacun faisant de soi le centre et se heurtant de toutes parts à la même prétention chez tous les autres, le conflit, la lutte pour l’autonomie et la suprématie est inévitable.

Vaincre ou être vaincu, — pas d’autre alternative. Le vainqueur sera le maître, le vaincu sera l’esclave : l’un jouira de la souveraineté et des « droits du seigneur », l’autre remplira, plein de respect et de crainte, ses « devoirs de sujet ».

Mais les adversaires ne désarment pas ; chacun d’eux reste aux aguets, épiant les faiblesses de l’autre, les enfants celles des parents, les parents celles des enfants (la peur, par exemple) ; celui qui ne donne pas les coups les reçoit.

Voici la voie qui, dès l’enfance, nous conduit à l’affranchissement : nous cherchons à pénétrer au fond des choses, ou « derrière les choses » ; pour cela nous épions leur point faible (en quoi les enfants sont, comme on le sait, guidés par un instinct qui ne