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c’est-à-dire tel que je suis, je n’ai aucun droit ; les droits sont l’apanage de l’Homme, et c’est lui qui m’autorise et me justifie. Comme Homme, je puis avoir un droit, mais je suis plus qu’Homme, je suis un homme particulier, aussi ce droit peut-il m’être refusé à Moi, au particulier.

Mais si vous savez faire cas de votre richesse, si vous tenez à haut prix vos talents, si vous ne permettez pas qu’on vous force à les vendre au-dessous de leur valeur, si vous ne vous laissez pas mettre en tête que votre marchandise n’est pas précieuse, si vous ne vous rendez pas ridicules par un « prix dérisoire », mais si vous imitez le brave qui dit : « Je vendrai cher ma vie (ma propriété), l’ennemi ne l’aura pas à bon marché », — alors vous aurez reconnu comme vrai le contraire du Communisme, et l’on ne pourra plus vous dire : renoncez à votre propriété ! Vous répondriez : je veux en profiter.

Au fronton de notre siècle, on ne lit plus la maxime delphique : « Connais-toi toi-même », mais bien : « EXPLOITE-TOI TOI-MÊME ! »

Proudhon dit que la « propriété, c’est le vol ». Mais la propriété d’autrui (il ne parle que de celle-là) n’existe que par le fait d’une renonciation, d’un abandon, comme une conséquence de mon humilité ; elle est un cadeau. Que signifient alors toutes ces grimaces sentimentales ? Pourquoi faire appel à la compassion comme un pauvre volé, quand on n’est qu’un imbécile et un lâche faiseur de cadeaux ? Et pourquoi rejeter toujours la faute sur les autres et les accuser de nous voler, alors que c’est nous-mêmes qui sommes en faute en ne les volant pas ? S’il y a des riches, la faute en est aux pauvres.

En général, personne ne s’indigne et ne proteste contre sa propre propriété ; on ne s’irrite que contre celle d’autrui. Chacun, pour sa part, veut augmenter et non diminuer ce qu’il peut appeler sien et voudrait pouvoir appeler tout ainsi. Ce n’est en réalité