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doivent considérer cette peine comme un crime contre la liberté, et ce n’est qu’à ce point de vue que l’opinion publique réprouve la loi en question.

La Société veut, il est vrai, que chacun obtienne son droit, mais ce droit n’est que celui que la Société a sanctionné, c’est le droit de la Société et non de chacun.


Moi, au contraire, c’est fort de ma propre puissance que je prends ou que je me donne un droit, et, vis-à-vis de toute puissance supérieure à la mienne, je suis un criminel incorrigible. Possesseur et créateur de mon droit, je ne reconnais d’autre source du droit que — Moi, et non Dieu, ni l’État, ni la Nature, ni même l’Homme avec ses « éternels droits de l’Homme » ; je ne connais pas plus de droit humain que de droit divin.

Droit « en soi et pour soi » : Donc, nullement relatif à moi ! Droit ; « absolu » : Donc, séparé de Moi ! Un être en soi et pour soi ! Un Absolu ! Un Droit éternel à côté d’une Vérité éternelle !

Le Droit, tel que le conçoivent les Libéraux, m’oblige, parce qu’il est une émanation de la Raison humaine, en face de laquelle ma raison n’est que « déraison ». C’est au nom de la Raison divine que l’on condamnait jadis la faible raison humaine ; c’est au nom de la puissante Raison humaine que l’on condamne aujourd’hui la raison égoïste sous le nom méprisant de « déraison ». Et cependant il n’y a de raison réelle que précisément cette « déraison ». Ni la raison divine ni la raison humaine n’ont de réalité ; seules ta raison et ma raison sont réelles, de même que et parce que toi et moi seuls sommes réels.

Par son origine, le Droit est une pensée ; c’est ma pensée, c’est-à-dire qu’elle a sa source en moi. Mais sitôt qu’elle a jailli hors de moi, sitôt le « mot » prononcé, « le verbe se fait chair » et cette pensée devient idée fixe. Dès lors, je ne puis plus m’en