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Aussi celui qui ne possède pas considère-t-il l’État comme une puissance tutélaire de ceux qui possèdent ; cet ange gardien des capitalistes est — un vampire qui lui suce le sang.

L’État est un État bourgeois, c’est le status de la Bourgeoisie. Il accorde sa protection à l’homme non en raison de son travail, mais en raison de sa docilité (loyalisme), suivant qu’il use des droits que l’État lui accorde en se conformant à la volonté, autrement dit aux lois de l’État.

Le régime bourgeois livre les travailleurs aux possesseurs, c’est-à-dire à ceux qui détiennent quelque bien de l’État (et toute fortune est un bien de l’État, appartient à l’État et n’est donnée qu’en fief à l’individu), et particulièrement à ceux entre les mains desquels est l’argent, aux capitalistes.

L’ouvrier ne peut tirer de son travail un prix en rapport avec la valeur qu’a le produit de ce travail pour celui qui le consomme. « Le travail est mal payé ! » Le plus gros bénéfice en va au capitaliste. — Mais bien payés, et plus que bien payés sont les travaux de ceux qui contribuent à relever l’éclat et la puissance de l’État, les travaux des hauts serviteurs de l’État. L’État paie bien, pour que les « bons citoyens », les possesseurs, puissent impunément payer mal. Il s’assure, en les payant bien, la fidélité de ses serviteurs et fait d’eux, pour la sauvegarde des bons citoyens, une « Police » (à la police appartiennent les soldats, les fonctionnaires de tout acabit, juges, pédagogues, etc., bref toute la « machine de l’État »). Les « bons citoyens » de leur côté lui paient sans faire la grimace de gros impôts, afin de pouvoir payer d’autant plus misérablement les ouvriers à leur service.

Mais les ouvriers ne sont, en tant qu’ouvriers, pas protégés par l’État ; en tant que sujets de l’état, ils ont simplement la cojouissance de la « police », qui leur assure ce qu’on appelle une « garantie légale » ; aussi la classe des travailleurs reste-t-elle une puissance