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nous-en simplement à la sage sentence des jurisconsultes : il est de droit naturel que l’homme et la femme vivent ensemble. Or, ce qui est un droit naturel est l’ordre de Dieu transporté dans la nature, et est donc aussi un droit divin. »

Et qu’est Feuerbach, sinon un protestant éclairé, lorsqu’il déclare sacrées toutes les relations morales, non point en vérité comme conformes à la volonté divine, mais en raison de l’Esprit qui habite en elles ? « Le mariage — naturellement en tant qu’union libre dans l’amour — est sacré par lui-même, par sa nature même de contrat. Le mariage n’est religieux que lorsqu’il est vrai et répond à l’essence du mariage, qui est l’amour. Il en est de même pour toutes les relations du monde moral ; elles ne sont morales, elles n’ont de valeur au point de vue de la moralité que si elles sont par elles-mêmes religieuses. Il n’y a de véritable amitié que là où les bornes de l’amitié sont religieusement observées, avec autant de scrupules que le croyant en met à sauvegarder la dignité de son Dieu. Sacrés sont et nous doivent être l’amitié, la propriété, le mariage, le bien de chaque homme, mais sacrés en eux-mêmes et par eux-mêmes  »

C’est là un point essentiel, sur lequel je veux insister. D’après le Catholicisme, le mondain, le séculier peut bien être consacré ou sanctifié, mais il n’est pas saint sans cette bénédiction sacerdotale ; d’après le Protestantisme, au contraire, le temporel est saint par lui-même, du fait de sa seule existence.

À cette consécration ecclésiastique, source de toute sainteté, est intimement liée la maxime jésuitique : « La fin justifie les moyens. » Un moyen n’est en soi ni saint ni non-saint, mais, appliqué aux besoins de l’Église, utile à l’Église, le voilà sanctifié. Le régicide, par exemple, est un de ces moyens ; lorsqu’