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de valeur qu’à l’homme selon l’esprit, au prêtre. Cette indulgence du Catholicisme, et spécialement des Jésuites, pour l’égoïsme trouva au sein même du Protestantisme une involontaire et inconsciente adhésion, et nous sauva de la déchéance et de la ruine de la sensualité. Toutefois, l’influence de l’esprit protestant ne cesse de s’étendre, et l’esprit jésuitique, qui, près de cet esprit « divin », représente le « diabolique » inséparable de toute divinité, ne parvient nulle part à se maintenir seul ; il est le témoin forcé, en France notamment, de la victoire du philistinisme protestant et de l’allégresse de l’Esprit triomphant.



On a coutume de louer le Protestantisme de ce qu’il a remis en honneur le temporel, comme par exemple le mariage, l’État, etc. Mais en réalité le temporel en tant que temporel, le profane, lui est bien plus indifférent encore qu’au Catholicisme ; non seulement le catholique laisse subsister le monde profane, mais il ne s’interdit pas de goûter aux jouissances mondaines, tandis que le protestant, lorsqu’il raisonne et qu’il est conséquent, travaille à anéantir le temporel par 1e seul fait qu’il le sanctifie. C’est ainsi que le mariage a perdu son ingénuité naturelle en devenant sacré — non pas sacré tel que le fait le Sacrement catholique, qui implique qu’il est en lui-même profane et ne reçoit que de l’Église sa consécration — mais sacré au sens protestant, sacré par essence, un lien sacré. Il en est de même de l’État : jadis le Pape consacrait l’État et ses princes en les bénissant ; aujourd’hui l’État, la Majesté sont par eux-mêmes sacrés sans qu’au préalable la main du prêtre ait dû s’étendre sur eux.

En somme, l’ordre de la Nature, ou Droit naturel, a été sanctifié sous le nom d’« ordre divin ». La Confession d’Augsbourg, art. II, dit par exemple : « Tenons-