effondré. Je préfère ne pas arrêter mon souvenir sur le pitoyable spectacle qu’il nous offrit lorsque, tout souriant et la tête haute, Fenn, ce prestigieux gredin, entra dans la chambre, avec tout l’air d’un homme qui aurait eu à s’acquitter d’un devoir public. M. Romaine lui-même eut pitié de mon malheureux cousin, et s’employa pour empêcher Burchell Fenn de trop s’appesantir sur les détails de leurs communes trahisons ; mais Burchell Fenn mit à y insister une énergie implacable, nous révélant en outre toutes sortes d’escroqueries, purement privées, qu’il n’avait commises, disait-il, que « pour faire plaisir au vicomte de Saint-Yves », encore que l’on devinât bien que lui-même n’avait pas été trop malheureux d’avoir à les commettre.
À la fin, je dus intervenir, et, peut-être avec moins de politesse que ne l’auraient exigé les convenances, j’invitai M. Burchell Fenn à nous laisser en paix. Nous pûmes alors aborder à loisir une discussion d’affaires, dont le résultat fut qu’Alain renonça par écrit à toutes ses prétentions, et accepta un subside annuel de quinze mille francs. M. Romaine voulait y joindre encore, comme condition, qu’Alain ne mît jamais le pied en Angleterre ; mais Dudgeon et moi demandâmes tous deux que cette humiliante condition ne fût pas stipulée : moi, par humanité, et Dudgeon en alléguant que, de toute manière, le vicomte de Saint-Yves ne serait guère tenté de retourner dans un pays où, dès son arrivée, il serait immanquablement envoyé à la prison pour dettes.
« Eh bien ! monsieur, nous n’avons pas perdu notre journée ! » me dit Romaine lorsque nous nous retrouvâmes seuls, quelques instants après.
Et il s’apprêtait à achever cette excellente journée en m’adressant, suivant son habitude, quelques remontrances morales ; mais je l’interrompis pour lui demander la lettre de Flora.
« Mon Dieu ! répondit le gros, homme avec un sourire singulier, je l’ai oubliée chez moi ! Je vous la remettrai ce soir, vers six heures, si vous voulez me faire l’amitié