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— Je le serai dans la mesure du possible, mon cher cousin ! dit-il. Mais, d’abord, vous accorderez bien que je me mette à l’aise ? »

Il prit l’unique fauteuil de la pièce, s’assit devant la table, et tira de sa poche une feuille de papier pliée en deux.

« Peut-être ne saviez-vous pas encore, dit-il, que notre oncle, — notre cher et regretté oncle, si cela vous plaît ! — est mort enfin, il y a trois semaines ?

— Que Dieu donne le repos à son âme ! m’écriai-je.

— Vous m’excuserez de ne point prendre part à cette pieuse espérance ! je souhaiterais plutôt, quant à moi, que l’âme de notre vénéré oncle… »

Suivit un vilain blasphème, que l’on me dispensera de répéter ici. Après quoi, mon cousin, s’étant soulagé la conscience, reprit :

« Je n’ai pas besoin de vous rappeler une certaine scène ! — d’ailleurs un peu trop théâtrale pour mon goût, — organisée par un pied-plat de notaire au chevet de notre oncle ; et je n’ai pas besoin non plus de vous dire quel est l’heureux légataire de toute la fortune du défunt, d’après un testament signé par lui lorsqu’il n’était déjà plus que l’ombre de lui-même. Mais il se peut que vous ayez oublié un avertissement bien loyal que j’ai donné à votre ami Romaine, en votre présence. Je lui ai promis de soulever, en temps utile, la question de pression déloyale à l’égard du mourant ; et je l’ai prévenu que j’avais déjà des témoins tout prêts, pour affirmer que les dernières dispositions de mon oncle lui avaient été indûment extorquées. À ces témoins j’en ai ajouté, depuis, plusieurs autres. Et c’est en leur nom comme au mien que je viens vous demander d’avoir l’obligeance de signer le petit papier que voici ! »

Je pris la feuille, la dépliai, et y lus ce qui suit :

Je soussigné, comte Anne de Kéroual de Saint-Yves, ex-soldat dans l’armée de Bonaparte sous le nom de Champdivers, ex-prisonnier, sous le même nom, au Château d’Édimbourg,