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blées décemment, avec quelques tableaux sur les murs, de grands coquillages sur la cheminée, et, sur la table, quelques livres, dont je découvris par la suite qu’ils étaient tous d’un caractère dévot, et la plupart ornés de dédicaces autographes des auteurs : « À mon excellente amie chrétienne Bethiah Mac Rankine », ou bien « À ma pieuse connaissance dans le Seigneur, B. Mc Rankine ». Notre « amie chrétienne » alla donc jusqu’à nous montrer tout cela ; mais impossible de lui faire faire un pas de plus, impossible, en particulier, d’obtenir qu’elle consentît à ce qui aurait dû être pour elle la chose la plus naturelle et la plus plaisante : à savoir, de dire son prix ! Non, elle se tenait devant nous en hochant la tête, et, parfois, en la baissant tout à coup comme une tourterelle affligée. Elle avait la voix la plus plaintive que j’eusse jamais entendue, et elle s’en servait pour produire une série extraordinaire d’objections et de difficultés.

Elle nous déclara, par exemple, qu’elle ne pouvait pas s’engager à nous fournir le service.

« Eh ! madame, dis-je, j’ai mon domestique pour me servir !

— Lui ? demanda-t-elle. Seigneur Dieu ! Est-il votre domestique ?

— Je suis bien fâché, madame, de voir qu’il encourt votre désapprobation.

— Non, non, je n’ai pas dit cela. Mais il est si jeune ! Il sera grand casseur, j’en suis bien sûre ! Remplit-il bien ses devoirs religieux ?

— Oh ! oui, madame, » répondit Rowley avec une promptitude admirable ; après quoi fermant les yeux, il répéta, avec plus de célérité que de ferveur, le distique suivant :

Matthew, Mark, Luke and John,
Bless the bed that I lie on
 ![1]

  1. Mathieu, Marc, Luc et Jean, bénissez le lit sur lequel je suis couché !