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dû les brûler tous… Il fallait garder quarante livres !

— Quarante livres, répéta le prince, pourquoi, au nom du ciel, quarante livres ?

— Pourquoi pas quatre-vingts ? s’écria le colonel ; il devait y en avoir une centaine dans le paquet.

— Quarante livres suffisent, dit le jeune homme tristement, car sans cela, il n’y a pas d’admission possible. La règle est absolue : quarante livres pour chacun. Vie damnée que la nôtre ! Un homme ne peut pas même mourir sans argent. »

Le prince et le colonel échangèrent un coup d’œil.

« Expliquez-vous, dit le dernier. J’ai encore un portefeuille passablement garni et je n’ai pas besoin de dire que je suis prêt à partager ma fortune avec Godall. Mais je désire savoir à quelle fin. Que pensez-vous donc faire ? »

Le jeune homme promenait des regards inquiets de l’un à l’autre, comme au sortir d’un rêve. Il rougit violemment.

« Ne suis-je pas votre dupe ? demanda-t-il. Êtes-vous tout de bon des gens ruinés ?

— Je le suis, pour ma part, autant qu’on peut l’être, répliqua le colonel.

— Et, quant à moi, dit le prince, je vous en