Page:Stevenson - Les Nouvelles Mille et Une Nuits, trad. Bentzon.djvu/71

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans l’instant où ce qui a été, au début, complaisance coupable et bientôt criminelle, devient malheur involontaire, disgrâce passivement subie, maladie mortelle. Vous étiez tout à l’heure une créature responsable et libre, vous pouviez vous guérir, l’occasion s’offrait : un retard, indifférent en apparence, a tout perdu ; ce retard a suffi pour que vous ne soyez plus qu’un jouet déplorable de la fatalité. Peut-être le docteur Jekyll aurait-il pu secouer encore le joug de Hyde, si, après avoir renoncé à l’usage de la drogue maudits, il s’était défendu des faiblesses communes à presque tous les hommes, des indignes jouissances dont il n’abuse plus, mais qu’il recommence à goûter avec modération, clandestinement. Ce n’est pas le meurtre commis par Hyde, c’est un retour honteux de Jekyll à sa primitive faiblesse qui décide de l’affreuse catastrophe, Le docteur se fait personnellement complice du monstre qu’il craint désormais d’appeler, mais qui, sans qu’il l’appelle, est devenu maître d’envahir sa vie. Il y a là un point bien délicat et supérieurement traité. L’Écossais, avec son sentiment implacable de la justice, s’y révèle. On peut attendre beaucoup, assurément, de celui qui a su tirer, du mystère de la dualité humaine, des effets semblables. M. Stevenson dé-