Page:Stevenson - Les Nouvelles Mille et Une Nuits, trad. Bentzon.djvu/167

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en l’air et renversa le reste d’une pinte d’ale sur la nappe.

Le garçon lui proposa de le conduire au fumoir ; quoiqu’il eût préféré de beaucoup retourner tout de suite auprès de son dangereux trésor, il n’eut pas le courage de refuser et se laissa conduire dans un sous-sol sans jour, éclairé au gaz, qui servait, et sert peut-être encore, de café à l’hôtel Craven.

Deux hommes jouaient tristement au billard, assistés par un marqueur hâve et phtisique ; un moment Silas crut qu’ils étaient les seuls occupants de la salle. Mais, au second coup d’œil, son regard tomba sur un individu qui, dans un coin, fumait, les yeux baissés, de l’air le plus modeste et le plus respectable. Il se souvint d’avoir déjà rencontré cette figure ; malgré le changement complet de costume, il reconnut l’homme qu’il avait trouvé assis sur la borne de Box-Court et qui avait aidé à transporter sa malle. Aussitôt l’Américain se retourna et, se mettant à courir, ne s’arrêta que lorsqu’il se fut enfermé et verrouillé dans sa chambre.

Là, pendant toute la nuit, en proie aux plus terribles imaginations, il veilla auprès de la caisse fatale remplie de chair morte. L’allusion du porteur à sa malle pleine d’or le te-