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LE ROMAN DU PRINCE OTHON

(s’il est serviteur de Dieu) devrait s’être fait un foyer et une bonne renommée, et vivre au sein de l’un et de l’autre ; il devrait s’être choisi une femme et voir les fruits d’une union bénie grandir autour de lui, et ses œuvres devraient déjà, comme dit l’Évangile, commencer à le suivre.

— Ah bien ! Mais il est marié, le prince ! s’écria Fritz, pouffant grossièrement de rire.

— Cela semble vous divertir, Monsieur ? fit Othon.

— Eh ! oui donc, répliqua le jeune rustaud. Est-ce que vous ne saviez pas cela ? Je croyais que toute l’Europe le savait. Et il ajouta une pantomime suffisante pour expliquer son insinuation à l’esprit le plus obtus.

— Il est évident, Monsieur, reprit M. Gottesheim, que vous n’êtes pas du pays ! Mais, le fait est que toute la famille princière, toute la cour, ne consistent qu’en débauchés, et en fripons — les uns valent les autres. Voyez-vous, Monsieur, ces gens-là vivent dans l’oisiveté, et, ce qui s’ensuit généralement, dans la corruption. La princesse a un amant, un baron (à ce qu’il prétend), du fond de la Prusse. Et le prince, Monsieur, est si piètre homme, qu’il porte le chandelier. Là même n’est pas le pire, car cet étranger et sa maîtresse règlent ensemble les affaires d’État, tandis que le prince empoche le salaire et abandonne tout à vau-l’eau. Cela amènera pour sûr un châtiment dont, quelque vieux que je sois, je verrai peut-être la venue.

— Bon oncle, dit Fritz avec une animation nouvelle, pour ce qui concerne Gondremark vous vous méprenez, mais pour le reste vos paroles sont