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HEUREUSE INFORTUNE

idée ! Mais je m’écarte de mon sujet. Donc, je lui expliquai alors comme quoi ce qu’il me proposait était impossible, que je ne pouvais pas me battre : « Pas même si je vous souffletais ? » fit-il. Très drôle ! Ah ! que je voudrais mettre cela dans mon livre ! Bref, je fus vaincu. Je pris ce jeune homme en ma haute faveur, et sur-le-champ je déchirai ma petite chronique scandaleuse ; c’est là un des avantages dont vous êtes redevable à votre mari.

Séraphine demeura quelque temps en silence. Peu lui importait d’être incomprise par ceux qu’elle méprisait, elle n’avait rien de ce désir constant d’approbation qui possédait Othon : elle allait droit de l’avant, la tête haute. Devant Sir John, cependant, après ce qu’il venait de dire, devant l’ami de son mari, elle était prête à se courber.

— Que pensez-vous de moi ? demanda-t-elle brusquement.

— Je vous l’ai déjà dit, répliqua Sir John ; je pense que vous avez encore besoin d’un verre de mon bon vin.

— Voyons, dit-elle, ceci est indigne de vous ; vous n’avez pas coutume d’avoir peur de parler. Vous dites que vous avez de l’admiration pour mon mari ; eh bien, pour l’amour de lui, parlez-moi franchement !

— J’admire votre courage, dit le baronnet. Hors cela, ainsi que vous l’avez deviné et même exprimé, il y a peu de sympathies entre nos deux natures.

— Vous parliez de scandale ? poursuivit Séraphine. Y a-t-il eu un grand scandale ?

— Considérable, dit Sir John.