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LE ROMAN DU PRINCE OTHON

cela peut lui causer du plaisir, s’est-il écrié, je porterai la couronne du martyre : j’en embrasserai les épines ». Je vous le dis franchement, je lui ai remis l’ordre entre les mains, et l’ai supplié de résister. Vous qui avez trahi votre époux, vous pouvez me trahir auprès de Gondremark. Mon prince, lui, n’a voulu trahir personne. Comprenez bien ceci, s’écria la comtesse : c’est purement par sa condescendance que vous vous trouvez encore là, sur ce siège. Il ne tenait qu’à lui (et je lui en avais donné les moyens) d’intervertir les rôles. Il a refusé, et s’est laissé mettre en prison, au lieu, de vous y mettre. »

Ce fut avec une pénible émotion que la princesse prit alors la parole : — La violence de votre langage, commença-t-elle, me choque et me chagrine, mais je ne puis trouver de la colère contre une chose qui, quelque déplacée qu’elle soit, fait honneur à votre cœur. Il était juste que je susse tout ceci. Je veux bien condescendre à vous le dire, ce fut avec un regret profond que je me vis forcée à cette démarche. De plusieurs façons j’admets le prince… j’admets son amabilité. Ce fut notre grand malheur, ce fut en partie ma faute, que nous nous soyons trouvés si mal assortis. J’ai de l’estime, une estime sincère pour toutes ses qualités. Si nous n’étions que de simples particuliers je penserais tout comme vous. Il est difficile, je le sais, de faire la part des considérations d’État. Ce n’est qu’avec la plus grande répugnance que j’ai obéi à la voix d’un devoir plus élevé. Et aussitôt que j’oserai le faire, eu égard au salut de l’État, le prince sera remis en liberté, je vous le promets.