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DE L’AMOUR ET DE LA POLITIQUE

ce n’est pas possible, cela ne peut être ! Il faut que je l’entende de vos lèvres ! Ma femme est une enfant mal conseillée. Elle est étourdie, elle n’est pas cruelle ! « Mon prince, lui dis-je, une enfant, et par conséquent cruelle : l’enfant tue les mouches ». Il eut de la peine à comprendre cela.

— Madame de Rosen, dit la princesse d’un ton parfaitement calme, bien que la colère eût mis des roses sur son visage, qui vous a envoyée ici, et pourquoi ? Expliquez votre commission !

— Oh ! Madame, vous me comprenez parfaitement, j’en suis sûre, répliqua madame de Rosen. Je ne possède pas votre philosophie. J’ai le cœur sur la main… pardonnez-m’en l’indécence ! Ce n’est qu’un petit cœur… et je me lave les mains si souvent !

— Dois-je comprendre que le prince a été arrêté ? demanda la princesse en se levant.

— Pendant que vous étiez là à dîner ! dit la comtesse, qui resta nonchalamment assise.

— C’est bien. Vous avez fait votre commission. Je ne vous retiens plus.

— Oh ! non, Madame ! Avec votre permission, je n’ai pas encore fini. J’ai dû supporter bien des choses ce soir pour votre service. J’ai souffert. Oui, j’ai eu à souffrir pour votre service ! — Tout en parlant, elle déploya son éventail. Quelque précipité que pût être son pouls, l’éventail se balançait avec langueur. Rien ne trahissait son émotion, que l’éclat de ses yeux et de son teint, et le triomphe presque insolent avec lequel elle regardait la princesse. Il y avait entre elles d’anciennes rivalités, sur plus d’un compte. Ainsi du moins