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LE ROMAN DU PRINCE OTHON

combatte ? Aimeriez-vous à me voir me démener et mordre comme une belette prise au piège ? Non, Madame ! Annoncez à ceux qui vous ont envoyée, que je suis tout prêt à partir. J’aimerais au moins éviter tout scandale.

— Vous partez ! s’écria-t-elle. Vous partez, de votre propre volonté ?

— Je ne puis peut-être pas dire cela tout à fait, répondit-il. Mais je pars de bonne volonté. Depuis longtemps je désire un changement, et voici qu’on me l’offre. Pourquoi refuser ? Dieu merci, je ne suis pas assez dénué d’esprit pour faire une tragédie d’une pareille farce. — Il donna une chiquenaude au papier sur la table. — Vous pouvez donc annoncer que je suis prêt, dit-il de son grand air.

— Ah ! fit-elle, vous êtes plus en colère que vous ne voulez l’admettre.

— Moi, Madame, en colère ? Quelle folie ! De tous côtés on s’est donné la tâche de m’apprendre ma faiblesse, mon instabilité, combien peu je suis propre aux affaires du monde. Je suis un plexus de faiblesses, Madame… un prince impotent, un gentilhomme douteux. Et vous même, par deux fois, tout indulgente que vous êtes, vous avez dû réprouver ma légèreté. Comment pourrais-je concevoir de la colère ? Je puis souffrir, me voyant traiter ainsi, mais j’ai l’esprit assez honnête pour comprendre les raisons de ce coup d’État.

— Qui donc a pu vous mettre de telles idées en tête ! s’écria-t-elle, tout étonnée. Vous vous imaginez avoir mal agi ? Mais, mon prince, n’était-ce que vous êtes jeune et beau, je vous détesterais