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LE ROMAN DU PRINCE OTHON

réussi à obtenir l’argent dont il avait besoin, et le lendemain matin il lui faudrait désappointer le vieux Killian ; il lui faudrait, aux yeux de cette famille qui avait fait si peu de cas de lui, et auprès de laquelle il avait espéré jouer le rôle de héros consolateur, retomber encore plus bas qu’auparavant. Cela, pour un homme du tempérament d’Othon, eût été mortel. Non, il ne pouvait accepter cette situation. Et ainsi, tout en travaillant, en travaillant dur et sagement aux détails antipathiques de sa principauté, il mûrissait secrètement un plan qui devait le sauver d’embarras. C’était un projet aussi attrayant pour l’homme, que peu honorable pour le prince ; un projet dans lequel sa nature frivole trouvait une revanche de toute la gravité et de tout le labeur de cette après-midi. Il riait sous cape en y songeant : Greisengesang l’entendit avec surprise, et attribua l’effet de cette allégresse à l’escarmouche du matin.

Poursuivant cette idée, le vieux courtisan se hasarda à complimenter son souverain au sujet de son maintien : — Cela lui rappelait, dit-il, le père d’Othon.

— Quoi donc ? demanda le prince dont les pensées étaient à cent lieues.

— L’autorité de Votre Altesse au Conseil, précisa le flatteur.

— Ah ! cela ? Eh ! oui, répondit Othon. Mais, malgré sa nonchalance il sentit sa vanité délicatement chatouillée ; son esprit retourna aux détails de sa victoire, et s’y arrêta avec complaisance. — Je les ai tous domptés, pensa-t-il.

Avant que les affaires les plus pressantes eus-