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LE ROMAN DU PRINCE OTHON

sommes sur le point d’entrer en guerre, dit Othon.

— Ce qui est vrai, fit Séraphine.

— En guerre !… s’écria le prince. Et, avec qui donc, Messieurs ? La paix dans Grunewald a duré des siècles ; de quelle agression, de quelle insulte avons-nous à nous plaindre ?

— Votre Altesse, dit Gotthold, voici l’ultimatum. On en était à l’article de la signature même quand Votre Altesse est si opportunément arrivée.

Othon étala le document devant lui. Et tout en lisant il tambourinait des doigts sur la table. — Se proposait-on, demanda-t-il, d’expédier cette dépêche sans s’informer si tel était mon bon plaisir ?

Un des non-combattants, désireux de rentrer en grâce, s’offrit à répondre : — Monsieur le docteur d’Hohenstockwitz, hasarda-t-il, venait justement de prononcer son dissentiment.

— Qu’on me donne le reste de cette correspondance ! dit le prince. Les papiers lui furent passés, et il les lut patiemment d’un bout à l’autre. Pendant ce temps, les conseillers demeurèrent assez sottement à regarder droit devant eux, sur la table. Les secrétaires, au fond de la salle, s’entre-regardaient d’un air charmé : une scène au conseil était pour eux un spectacle rare et plein d’agrément.

— Messieurs, dit Othon, quand il eut achevé, j’ai lu tout ceci avec douleur. Cette prétention sur Obermünsterol est palpablement injuste : il n’y a pas là-dedans nuance, pas ombre de justice. En toute cette histoire il n’y a pas matière suffisante pour une discussion d’après-dîner… et vous vous proposez de la forcer en casus belli ?

— Il est vrai, Votre Altesse, dit Gondremark,