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DE L’AMOUR ET DE LA POLITIQUE 93


— Avec l’impétuosité de la jeunesse ! répondit Sir John. Votre Altesse ne se souvient pas d’une chose, c’est que je suis encore à jeun.

— Eh bien, Monsieur, dit Othon en souriant, vous êtes maître de vos mouvements, vous pouvez partir ou demeurer. Mais, je vous en préviens, votre ami pourrait bien se trouver moins puissant que vos ennemis. Le prince, il est vrai, est tout vôtre ; il ne désire rien plus que de vous aider ; Mais que sert de vous apprendre cela ? Vous savez encore mieux que moi qu’il n’est pas seul à Grunewald !

— La position compte pour beaucoup, répondit le voyageur, en secouant gravement la tête. Gondremark aime à temporiser ; sa politique est souterraine, et il redoute toutes les voies franches. Et maintenant que je vous ai vu agir avec tant de vigueur, je me risquerai gaiement sous votre protection. Qui sait ? Peut-être gagnerez vous encore la partie ?

— Est-ce là vraiment votre opinion ? s’écria le prince. Ah ! vous me revivifiez le cœur !

— Allons, je n’esquisserai plus de portraits, dit le baronnet. Je n’y vois pas assez clair, et je vous ai étrangement mal lu. Et, pourtant, souvenez-vous bien de ceci : un bond au départ, et une course soutenue, sont choses différentes. Car votre constitution m’inspire encore de la défiance : le nez court, les cheveux et les yeux de complexions différentes… Non, ce sont là des indices, et je vois qu’il me faut conclure comme j’ai commencé.

— Je suis donc toujours la soubrette ? fit Othon.