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— Oh ! non ! lui murmura Pitman. Plus d’eau-de-vie !

— Vous êtes vraiment extraordinaire ! se récria Michel. Il faut pourtant bien que nous fassions quelque chose ; et vous n’êtes pas sans savoir qu’on ne doit pas fumer avant les repas. Vous me paraissez absolument dépourvu de toute notion d’hygiène, mon pauvre vieux !

Et il alla regarder tomber la pluie, à la fenêtre.

Pitman, lui, se replongea dans sa triste rêverie. Ainsi donc c’était bien lui qui se trouvait grotesquement rasé, absurdement déguisé, en compagnie d’un homme ivre en lunettes, dans un restaurant étranger ! Que dirait la directrice de son pensionnat, si elle pouvait le voir en cet état ? Mais surtout que dirait-elle si elle pouvait savoir à quelle tragique et criminelle entreprise il se préparait ?

L’avoué, voyant que son ami était bien décidé à ne pas boire le verre d’eau-de-vie qu’on venait de lui servir, ne put cependant pas se résigner à boire seul.

— Tenez, dit-il au garçon, avalez-moi ça !

Et le garçon engloutit tout le contenu du verre, en deux gorgées, ce qui lui valut la plus vive sympathie de Michel.

— Jamais je n’ai vu un homme boire plus vite ! déclara-t-il à Pitman, quand le garçon fut sorti.