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ancien ; il remontait à l’époque romaine ; par le cours des temps, une bonne partie avait été défoncée, et çà et là, pendant des centaines de mètres, il était submergé sous les eaux du marais.

À un mille environ de Kettley, Dick arriva à une de ces interruptions de la chaussée, où les ajoncs et les saules avaient poussé au hasard, formant comme de petites îles, et cachaient le chemin. En outre, le défoncement était plus long que les autres ; c’était un endroit où tout étranger devait aisément se perdre ; et Dick se mit à penser, avec une sorte d’angoisse, au garçon qu’il avait si imparfaitement renseigné. Quant à lui, jetant un regard en arrière vers les ailes du moulin qui tournaient, noir sur le bleu du ciel, — un regard en avant sur les hauteurs de la forêt de Tunstall, il eut une direction suffisante et continua tout droit, malgré l’eau qui venait aux genoux de son cheval, aussi sûrement que sur une grande route.

À mi-chemin de cette passe, et déjà en vue du sentier qui émergeait sec de l’autre côté, il entendit sur sa droite un violent clapotis, et vit un cheval gris enfoncé dans la boue jusqu’au ventre, et qui faisait encore des efforts spasmodiques. Subitement, comme s’il eût deviné l’approche du secours, la pauvre bête se mit à hennir bruyamment. Affolé par la terreur, il roulait des yeux injectés de sang ; et, tandis qu’il se démenait dans la fondrière, des nuées de moustiques