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Et Lawless n’attendit pas d’être requis deux fois. Le terrible résultat de son accès de juste ressentiment le dégrisa complètement. Il savait mieux que personne à bord, combien la Bonne Espérance avait été près de s’enfoncer sous leurs pieds ; et il pouvait juger à la passivité avec laquelle elle avait reçu la mer, que le danger était loin d’être paré.

Dick, qui avait été renversé par le choc, et à moitié noyé, se leva, s’avança péniblement sur la proue inondée, de l’eau jusqu’aux genoux, et se faufila à côté du vieux timonier.

— Lawless, dit-il, notre sort à tous dépend de vous, vous êtes un homme brave, solide et habile à la manœuvre des navires, je vais mettre trois hommes sûrs pour veiller à votre sûreté.

— Inutile, mon maître, inutile, dit le timonier, perçant l’obscurité du regard. Peu à peu, nous nous dégageons de ces bancs de sable ; et peu à peu la mer nous jette des paquets de plus en plus lourds et, quant à tous ces pleurnicheurs, ils seront bientôt sur le dos. Car, mon maître, c’est un mystère, mais véritable, qu’il n’y a jamais eu de méchant homme qui soit un bon marin. Il n’y a que les gens honnêtes et braves qui puissent supporter ce ballottement d’un bateau.

— Non, Lawless, dit Dick en riant, c’est un vrai dicton de matelot, ça n’a pas plus de sens que le sifflement du vent. Mais, je te prie, com-