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LE VIEUX FLIBUSTIER

hameau. Il me dépassa de quelques pas, tout en appelant :

— Johnny, Chien-Noir, Dirk (et d’autres noms), vous n’allez pas abandonner votre vieux Pew, camarades… pas votre vieux Pew !

À cet instant, la cavalcade débouchait sur la hauteur, et l’on vit au clair de la lune quatre ou cinq cavaliers dévaler la pente au triple galop.

Pew comprit son erreur. Avec un grand cri, il se détourna et courut droit au fossé, dans lequel il s’abattit. Il se remit sur pied en une seconde et s’élança de nouveau, totalement affolé, en plein sous les sabots du cheval le plus proche.

Le cavalier tenta de l’éviter, mais ce fut en vain. Avec un hurlement qui résonna dans la nuit, Pew tomba, et les quatre fers le heurtèrent et le martelèrent au passage. Il roula de côté, puis s’affaissa mollement, la face contre terre, et ne bougea plus.

Je bondis, en hélant les cavaliers. Ils s’étaient arrêtés au plus vite, horrifiés de l’accident. Je les reconnus bientôt. L’un, qui suivait les autres à distance, était ce gars du hameau qui avait couru chez le docteur Livesey ; les autres étaient des officiers de la douane qu’il avait rencontrés sur son chemin et qu’il avait eu le bon esprit de ramener aussitôt. Les bruits concernant le chasse-marée de la cale de Kitt étaient parvenus aux oreilles de l’inspecteur Dance, et l’avaient amené ce soir-là de notre côté. C’est à ce hasard que ma mère et moi nous dûmes d’échapper au trépas.

Pew était mort, et bien mort. Quant à ma mère, une fois transportée au hameau, quelques gouttes d’eau froide et des sels eurent vite fait de la ranimer. Cependant, l’inspecteur galopait à toute vitesse jusqu’à la cale de Kitt ; mais ses hommes durent mettre pied à terre et descendre le ravin à tâtons,