Page:Stevenson - L'Île au trésor, trad. Savine-Lieutaud.djvu/13

Cette page n’a pas encore été corrigée

Les noms, les formes des terrains boisés, les cours des routes et des rivières, les premiers pas préhistoriques de L’homme qu’on peut encore distinguer au haut Lune colline ou autour d’une vallée, les lacs et les gués, peut-être la pierre verticale ou le cercle druidique dans la bruyère, offrent un inépuisable fonds d’intérêt pour quelqu’un qui a des yeux pour voir ou la valeur de deux pence d’imagination pour comprendre. Pas d’enfant qui ne s’en souvienne, en posant sa tête dans l’herbe et regardant la forêt sans bornes, qu’il voit grouillante de ses armées de fées.

Comme je contemplais dans cet esprit ma carte de Vile au Trésor, le caractère du livre commença à m’apparaître clairement entre des bois imaginaires. Les silhouettes bronzées et les armes brillantes de mes héros luttant et pourchassant un trésor sur ces quelques pouces carrés de ma carte émergèrent de lieux inespérés.

La première chose que je vis, c’est que j’avais quelques feuilles de papier devant moi et que j’écrivais une table de chapitres. Combien souvent j’ai fait ainsi, et tout est venu à la suite ! Cela semble être les éléments de succès pour ce genre d’entreprises.

Ce devait être une histoire pour la jeunesse : nul besoin donc de psychologie ou de belle littérature. J’avais un gamin près de moi comme pierre de touche. J’étais incapable de manœuvrer un brick ( comme l’Hispaniola en serait un), mais je pensais que je pourrais me tirer d’affaire et le faire voguer comme une goélette sans en éprouver une honte publique.

J’eus alors une idée pour John Silver, de qui je me promis tout un trésor de plaisirs. Je me ferais de lui un ami qu’on admire (le lecteur, très vraisemblablement, le connaît et l’admire autant que moi). Je lui enlèverais toutes ses plus

fines qualités et toutes ses plus hautes grâces de tempérament,

7