Page:Stevenson - Enlevé (trad. Varlet), 1932.djvu/48

Cette page n’a pas encore été corrigée

Je les comptai ; et j’étais si bouleversé que je dus recommencer deux fois.

– Quinze, dis-je.

Alan siffla.

– Tant pis, dit-il, nous n’y pouvons rien. Et maintenant, suivez-moi bien. C’est mon rôle dans la bataille. Vous n’avez rien à y voir. Et surtout rappelez-vous de ne pas tirer de ce côté à moins qu’ils ne m’aient renversé ; car j’aime mieux dix ennemis en face de moi qu’un ami comme vous tirant des coups de pistolet dans mon dos.

Je lui avouai qu’en effet je n’étais pas un fameux tireur.

– Et voilà une brave parole ! s’écria-t-il, admirant beaucoup mon ingénuité. Maints fiers gentilshommes n’oseraient en dire autant.

– Mais, monsieur, dis-je, il y a cette autre porte, derrière vous, qu’ils pourraient bien enfoncer.

– Oui, dit-il, et c’est là une part de votre besogne. Sitôt les pistolets chargés, vous allez monter sur ce lit contre la fenêtre ; et, s’ils s’attaquent à la porte, vous tirez dessus. Mais ce n’est pas tout. Faisons de vous un soldat, David. Qu’avez-vous encore à garder ?

– Le vasistas, dis-je. Mais en vérité, monsieur Stewart, il me faudrait avoir des yeux de tous les côtés pour surveiller porte et vasistas ; quand j’aurai le nez à l’une, je tournerai le dos à l’autre.

– Très juste, dit Alan. Mais n’avez-vous pas aussi des oreilles ?

– À coup sûr ! m’écriai-je. J’entendrai casser le carreau.

– Vous avez quelques rudiments de bon sens, dit Alan, avec un sourire amer.


X. Le siège de la dunette


Mais la trêve allait expirer. Ceux du pont avaient attendu mon retour, avec une impatience croissante ; et Alan n’avait pas fini de parler, que la tête du capitaine se montra dans l’ouverture de la porte.

– Halte ! s’écria Alan, qui pointa son épée vers lui.

Le capitaine fit halte, mais sans sourciller ni reculer d’un pas.

– Une épée nue ? dit-il. Singulier remerciement de l’hospitalité !

– Regardez-moi, dit Alan. J’ai eu des rois pour aïeux ; je porte un nom de roi. J’ai sur mon blason un chêne. Voyez-vous mon épée ? Elle a tranché les têtes de plus de whigs que vous n’avez d’orteils à vos pieds. Appelez votre vermine à votre suite, monsieur, et en garde ! Plus tôt commencera la lutte, plus tôt vous goûterez de cet acier au travers du corps.

Le capitaine, sans lui répondre, me lança un mauvais regard :