Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/329

Cette page a été validée par deux contributeurs.

habits mêmes, selon l’expression de l’Écriture, avaient horreur de moi.

J’étais mortellement las, gravement atteint.

J’éprouvais partout des douleurs et des frissons, le froid glacial du vent me traversait et son gémissement bourdonnait dans mes oreilles.

Dans cet état misérable, j’avais à souffrir de mon compagnon une véritable persécution.

Il parlait beaucoup, et jamais sans une pointe d’ironie.

Whig était le nom le plus flatteur qu’il m’appliquait.

— Ah ! me disait-il, mon petit Whig, voilà un saut à faire, je sais que vous êtes un bon sauteur.

Et ainsi de suite, et toujours avec une raillerie dans la voix et la physionomie.

Je savais que c’était ma faute et non celle d’autrui, mais j’étais trop malheureux pour me repentir.

Je sentais que je ne pourrais guère me traîner plus loin.

Il me faudrait me coucher et mourir sur ces montagnes noyées de pluie, comme un mouton ou un renard. Il faudrait que mes os blanchissent là comme ceux d’une bête.

On dira peut-être que je m’en accommodais aisément, mais je commençai à me plaire à cette perspective.

Je commençai à m’enorgueillir à l’idée de mourir ainsi seul dans le désert, pendant que les aigles sauvages tourmenteraient mes derniers instants.

— Alors Alan se repentirait, pensais-je ; il se souviendrait, dès que je serais mort, de tout ce qu’il me devait et ce souvenir lui serait une torture.

J’allais donc, avec l’air d’un écolier mal portant, rétif, au cœur mauvais, en nourrissant ma colère contre