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départ, nous étions debout avant cinq heures du matin, mais mon coquin de guide se remit à boire, et il était bien près de trois heures quand je pus le faire sortir de la maison, et ce ne fut, comme vous allez le voir, que pour éprouver un autre désappointement pire encore.

Tant que nous traversâmes une vallée tapissée de bruyère qui s’étendait devant la maison de M. Maclean, tout alla bien, à cela près que mon guide regardait à chaque instant par-dessus son épaule ; et quand je lui demandais pourquoi, il se bornait à ricaner.

Mais dès que nous eûmes dépassé le sommet d’une colline et perdu de vue les fenêtres de la maison, il me dit que Torosay se trouvait juste en face, et qu’un sommet de colline, qu’il me désigna, serait mon meilleur point de repère.

— Cela m’importe peu, puisque vous irez avec moi, lui dis-je.

L’insolent coquin me répondit en gaélique qu’il ne parlait pas en anglais.

— Mon brave, lui dis-je, je sais que votre anglais va et vient. Dites-moi où vous voulez en venir ? Voulez-vous encore de l’argent ?

— Cinq shellings de plus, dit-il, et on vous y conduira tout seul.

Je réfléchis un instant et alors lui en offris deux qu’il accepta avidement, en insistant pour que je les lui donnasse tout de suite pour lui porter bonheur, dit-il, mais je crois que ce fut plutôt une malchance pour moi.

Les deux shellings ne nous menèrent pas beaucoup plus loin que deux milles. Au bout de ce parcours, il s’assit au bord de la route et ôta ses brogues en homme qui va se reposer.

À ce moment, j’étais pourpre de colère.