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se parler sans effort, ils serrèrent la voile et restèrent immobiles.

Malgré mes supplications, ils refusèrent de venir plus près et ce qui m’effraya le plus, ce fut de voir le nouveau venu se tordre de rire tout en me parlant et me regardant.

Alors il se tint debout dans le bateau, et me parla longuement d’une voix hâtive, et en faisant de grands gestes de la main.

Je lui dis que je ne savais pas un mot de gaélique. Sur quoi il se mit fort en colère, et je fus sur le point de soupçonner qu’il se figurait parler anglais.

À force de tendre l’oreille, je saisis le mot Whateffer, prononcé plusieurs fois, mais tout le reste était du gaélique et eût tout aussi bien pu être du grec ou de l’hébreu pour moi.

Whatever, lui dis-je, pour lui montrer que j’avais compris un mot.

— Oui, oui, oui, oui, fit-il.

Et alors il regarda les autres hommes, comme pour leur dire :

— Vous le voyez bien, que je parle anglais.

— Puis il se remit de toutes ses forces à parler gaélique.

Cette fois je saisis au passage le mot de marée ; alors j’eus un rayon d’espoir.

Je me rappelle qu’il ne cessait d’agiter la main vers la terre ferme de Ross.

— Voulez-vous dire, à marée basse ! m’écriai-je.

Et je ne pus achever.

— Oui, oui, dit-il, marée.

Sur ces mots, je tournai le dos à leur bateau, où mon interlocuteur avait recommencé à se tordre de rire, je refis le chemin que je venais de parcourir,