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J’étais à peine revenu à mon rocher (c’était la première chose que je faisais après avoir mangé) que je remarquai un bateau se dirigeant vers le détroit, la proue dans ma direction, à ce qu’il me semblait.

J’éprouvai aussitôt une violente commotion où se mêlaient l’espoir et la crainte.

Je pensai que ces hommes avaient réfléchi à leur cruauté, et qu’ils revenaient pour me secourir.

Mais un autre désappointement comme celui que j’avais éprouvé la veille, c’était plus que je ne pouvais en supporter.

Je tournai donc le dos à la mer, et je ne la regardai pas avant d’avoir compté plusieurs centaines.

Le bateau était toujours en marche vers l’île.

Une autre fois, je comptai jusqu’au mille complet, aussi lentement que je pus, mon cœur battant au point de me faire souffrir.

Mais cette fois, il n’y avait pas à en douter, il venait droit sur Earraid.

Je ne pus me retenir davantage, je courus au bord de la mer, d’un rocher à l’autre, de toute ma vitesse.

C’est un miracle que je ne me sois pas noyé, car lorsque je dus enfin m’arrêter, mes jambes fléchirent sous moi.

J’avais la bouche si sèche qu’il me fallut la mouiller avec de l’eau de la mer avant que je pusse les appeler.

Pendant tout ce temps, le bateau avançait.

Je pus alors reconnaître que c’était le même bateau et les deux mêmes hommes que la veille.

Je savais cela par la couleur de leurs cheveux, qui chez l’un étaient d’un blond clair, et noirs pour l’autre.

Mais il y avait avec eux un troisième homme qui semblait appartenir à une classe plus élevée.

Dès qu’ils furent arrivés assez près pour que l’on pût