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ambulant, et tout cela couvert des apparences de la légalité, pour achever de vous mettre en fureur.

— Vous qui êtes si prodigue de vos boutons, dis-je, j’ai de la peine à croire que vous soyez un bon juge en affaires.

— Ah ! fit-il en retrouvant son sourire, je tiens ma prodigalité du même homme qui m’a donné les boutons, et ce fut mon propre père, Duncan Stewart. Qu’il repose en paix !

C’était le plus bel homme de toute la parenté, et le meilleur tireur à l’épée qu’il y eût dans les Highlands, David, et cela revient à dire, le meilleur qu’il y eût de par le monde. Je dois le savoir, car il a été mon maître. Il était dans la garde noire, quand elle fut formée, et comme les autres gentlemen, simples soldats, il avait un valet derrière lui pour porter son mousquet dans les marches.

Bon, il paraît qu’un jour le Roi eut la fantaisie de voir l’escrime écossaise à l’épée ; mon père et trois autres furent choisis et envoyés à Londres, pour qu’il pût en juger comme il faut.

Bien ! on les introduit. Ils donnent une séance d’escrime qui dure deux heures de suite, devant le roi George, la reine Caroline et le boucher Cumberland, et un grand nombre d’autres dont le nom m’importe peu.

Quand ils eurent fini, le Roi (cela n’empêche qu’il soit un fieffé usurpateur), le Roi leur parla avec bonté et mit trois guinées dans la main de chacun.

Or, comme ils sortaient du palais, ils eurent à passer devant la loge du portier.

Mon père se dit qu’il était peut-être le premier gentleman simple soldat qui eût jamais passé par cette porte, et qu’il était très à propos de donner au pauvre portier une idée convenable de leur qualité.