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et je ne voudrais pas vous perdre, quand on me donnerait tout Appin, et même tout Breadalbane.

Il me fit aussitôt une couchette sur le sol, et prit la première garde, le pistolet à la main et l’épée sur les genoux, pendant trois heures, d’après la montre du capitaine, qui était accrochée au mur.

Alors il me réveilla, et je montai la garde pendant trois heures aussi.

Avant qu’elle fût terminée, il était grand jour.

C’était une matinée très calme, avec une mer lisse et roulante qui balançait le vaisseau et faisait couler le sang de droite à gauche et de gauche à droite dans la dunette, et une grosse pluie qui tambourinait sur le toit.

Pendant toute ma garde, rien ne bougea.

Le battement du gouvernail me prouva qu’il n’y avait personne à la barre.

En fait, comme je l’appris plus tard, il y avait tant de blessés et de morts, et les autres étaient si mal disposés, qu’alors M. Riach et le capitaine, tout comme Alan et moi, nous dûmes nous mettre à la barre. Sans quoi le brick eût été jeté à la côte, et personne ne s’en serait mieux trouvé.

Ce fut un bonheur que la nuit eût été si calme, car le vent était tombé dès les premières gouttes de pluie.

Même dans cette situation, je jugeai, d’après les gémissements d’un grand nombre de mouettes qui criaient et pêchaient autour du navire, que nous avions dû dériver très près de la côte ou d’une des îles Hébrides.

Enfin je regardai par la porte de la dunette, et j’aperçus les grandes collines pierreuses de Skye, à droite, et un peu plus à l’arrière la singulière île de Rum.