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sa fille, et moins encore ce que vous avez à lui dire ! s’écria-t-elle ; je ne veux pas connaître ceux qui sont contre lui !

— Je prendrai cependant la liberté de vous dire un mot, répliquai-je commençant à trembler : peut-être que ni votre père, ni moi n’étions de bonne humeur chez Prestongrange ; je crois que tous les deux, nous y allons pour d’ennuyeuses affaires, car c’est une maison dangereuse. J’ai d’ailleurs compati à ses peines et je lui ai parlé le premier (puissé-je avoir parlé le plus sagement des deux !) ; du reste, ses affaires sont, je crois, en train de s’arranger.

— Votre amitié n’y sera pour rien, je suppose, dit-elle, et il vous sera bien obligé de votre compassion !

— Miss Drummond, m’écriai-je, je suis seul en ce monde !

— Cela ne m’étonne pas ! fit-elle.

— Oh ! laissez-moi parler ! je ne parlerai que cette fois et puis je vous quitterai, si vous voulez, pour toujours. Je suis venu aujourd’hui dans l’espoir de recueillir un mot affectueux, dont j’ai très grand besoin. Je sais que ce que je vous ai dit doit vous blesser et je le savais avant de parler. Il m’aurait été facile de vous débiter des douceurs, de vous mentir ; ne pouvez-vous concevoir combien j’ai été tenté de le faire ? Ne pouvez-vous deviner la droiture de mon cœur ?

— C’est une tâche difficile que vous me donnez là, monsieur Balfour. Je crois que nous étant rencontrés une fois, nous pouvons nous séparer bons amis comme des gens bien élevés.

— Oh ! il faut que quelqu’un croie en moi ! m’écriai-je, sans cela, je ne pourrai supporter ma peine. Le monde entier est ligué contre moi. Comment aurai-je la force de marcher vers ma terrible destinée si personne ne veut croire en moi ? C’est impossible, cet homme mourra, car le sauver sera au-dessus de mes forces. »