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depuis votre arrivée à Leyde, et que vous l’avez caché à votre fille.

— Je vous serais reconnaissant de modérer vos paroles, je ne veux pas de nouvelles provocations ; j’en ai assez, d’elle et de vous ! J’ai dû essuyer des injures. J’ai le cœur d’un père et le cœur d’un soldat, monsieur ! J’ai été outragé des deux côtés et je vous prie de prendre garde !

— Si vous me laissiez parler, répondis-je, vous verriez que je pense encore à vos intérêts.

— Mon cher ami, je savais que je devais compter sur votre générosité !

— Le fait est que j’ignore si vous êtes riche ou pauvre ; ce que je sais, c’est que vos moyens ont une source mystérieuse et qu’ils ne sont pas toujours suffisants, ni réguliers. Or je ne veux pas que votre fille en souffre. Si je l’osais, c’est à elle que je m’adresserais et non à vous ; je crois cependant que vous aimez Catriona à votre façon, et il faut bien que je me contente d’avoir affaire à vous. »

Après ce préambule je lui dis que je désirais rester en relations avec lui et connaître ses moyens d’existence, à cette condition, je lui servirais une petite pension.

Il fut agréablement surpris, et quand tout fut convenu, il s’écria :

« Mon cher ami ! mon cher fils ! je ne puis assez vous remercier, je vous obéirai avec la fidélité d’un soldat.

— Ne me parlez plus de rien ! m’écriai-je, vous m’avez si bien poussé à bout que le mot seul de soldat me prend à la gorge ; voilà notre marché conclu, je m’en vais sortir et, dans une demi-heure, j’espère retrouver mes chambres vides. »

Je leur fis bonne mesure, je ne voulais pas revoir Catriona, car je craignais ma faiblesse, et la colère me semblait convenir à ma dignité. Une heure s’écoula, la