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quand je ne serais plus leur vache à lait. Mais après quelques minutes données ainsi à la colère, je sentis que je ne pourrais supporter de savoir Catriona exposée aux privations, et je me dis que je me devais à moi-même de veiller à ce qu’elle ne manquât de rien.

Je repris aussitôt le chemin de la maison où je trouvai les malles fermées devant la porte, et le père et la fille côte à côte, donnant des signes de colère et de mécontentement. Catriona semblait en proie à une froide irritation, James More respirait bruyamment, sa figure était marbrée et bouleversée ; dès que je parus, elle le regarda d’un air significatif et méprisant et je fus surpris de voir qu’il subissait ce traitement sans révolte. Il était visible qu’il avait trouvé son maître.

Il commença à me parler en m’appelant M. Balfour, sans doute d’après une consigne donnée, mais il n’alla pas loin, car à la première phrase pompeuse qu’il essaya, elle l’interrompit.

« Mon père veut vous dire, que nous sommes venus à vous comme des mendiants et que nous sommes honteux de notre ingratitude. Maintenant, nous sommes décidés à partir et nous faire oublier ; mais même pour cela, nous devons encore vous demander l’aumône, car voilà où nous en sommes réduits !

— Avec votre permission, Miss Drummond, répondis-je, j’aurais à échanger quelques mots avec votre père. »

Elle passa dans sa chambre, et en ferma la porte sans un mot, ni un regard.

« Excusez-la, monsieur Balfour, elle n’a pas d’éducation.

— Ce n’est pas ce que j’ai à discuter avec vous, dis-je ; mais il faut que je vous parle. Jusqu’ici, monsieur Drummond, j’ai gardé pour moi ce que je devinais de votre conduite : je sais que vous aviez de l’argent quand vous m’en avez emprunté, je sais que vous en avez eu davantage