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cependant, n’exprimer aucun désir, aucune passion, paraissait trop froid.

Entre ces deux extrêmes, j’hésitais à me décider, et je m’en désolais. Quand, à la fin, j’ouvris la bouche, ce fut au hasard.

« Catriona, je suis dans une situation pénible, je vous serais bien reconnaissant si vous vouliez me promettre de me laisser parler jusqu’à ce que j’aie fini. »

Elle me le promit.

« Eh bien, ce que j’ai à vous dire est difficile et je sais très bien que je n’ai aucun droit de le faire, après ce qui s’est passé entre nous vendredi dernier. Nous avons si bien embrouillé nos affaires que j’avais pris la résolution de me taire et rien n’était plus loin de ma pensée que de venir vous importuner. Mais c’est devenu nécessaire, je ne puis y échapper… l’héritage de mon oncle fait de moi un meilleur parti… il ne paraîtrait pas si ridicule de m’épouser… d’ailleurs, en admettant que nous ayons gâté nos affaires, comme je le rappelais tout à l’heure, si vous le vouliez, il serait facile de les arranger… seulement, je devais commencer par vous dire tout cela, car aux yeux de James More, c’est très important, et cela a pesé sur sa décision. Ne pensez-vous pas que nous avons été heureux dans cette ville, avant son arrivée ? Ne pourrions-nous pas l’être encore ? si vous consentiez seulement à jeter un regard en arrière…

— Je ne veux regarder ni en arrière, ni en avant, interrompit-elle, dites-moi une seule chose : cette démarche vous a-t-elle été suggérée par mon père ?

— J’ai son approbation, répondis-je. Il m’a donné la permission de vous demander votre main. »

J’allais faire appel à ses sentiments, mais elle ne m’en laissa pas le temps et s’écria brusquement.

« C’est lui qui vous a conseillé de chercher à m’épou-