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commença-t-il, car dans notre première entrevue, j’avais employé quelques expressions que vous aviez mal comprises et il me tardait de vous les expliquer. Ma fille est au-dessus de tout soupçon, vous de même, et je suis prêt à le soutenir à la pointe de l’épée. Mais, mon cher David, vous ne l’ignorez pas, le monde est sévère : qui le sait mieux que moi, hélas ? qui suis victime de la calomnie ! Nous ne devons pas oublier l’opinion du monde, il faut en tenir compte.

— À quoi voulez-vous en venir, monsieur Drummond ? demandai-je, en le regardant en face, je vous serais obligé de vous expliquer.

— Voilà bien l’impatience de la jeunesse ! Ne sentez-vous pas que ce que j’ai à vous dire est un peu délicat (il remplit son verre) ; voyons, entre amis, il n’y a pas à tergiverser. Vous devinez qu’il s’agit de ma fille, mais je me hâte d’ajouter que je n’ai nullement l’intention de blâmer votre conduite, les circonstances ont été telles que vous n’avez pas eu le choix.

— Je vous remercie.

— J’ai d’ailleurs étudié votre caractère, continua-t-il, vous êtes intelligent, instruit, vous avez de la fortune, ce qui ne gâte rien ; enfin, tout compté, je suis heureux de vous annoncer que je me suis décidé pour le plus doux des deux partis à prendre.

Je ne comprends pas, dis-je. »

Il fronça le sourcil et décroisa ses jambes.

« Comment ! Monsieur, fit-il, je pense que je n’ai pas besoin d’expliquer à un jeune homme de votre condition que deux solutions seulement peuvent me satisfaire : vous couper la gorge ou vous donner ma fille en mariage.

— Au moins, vous êtes clair maintenant.

— Je crois l’avoir été dès le commencement ; je suis un bon père, monsieur Balfour, mais je suis aussi un