Page:Stevenson - Catriona.djvu/251

Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Emmenez-moi, David, supplia-t-elle, c’est vous qui êtes ma sauvegarde, je n’ai pas peur avec vous.

— Vous savez bien que vous n’avez rien à craindre, ma petite amie, m’écriai-je, ému jusqu’aux larmes.

— Où allez-vous me conduire ? reprit-elle, ne me quittez pas, en tout cas, ne me quittez jamais.

— Où vous conduire en effet ? dis-je en m’arrêtant (car j’avais marché droit devant moi en aveugle !). Il faut réfléchir, mais je ne vous quitterai pas Catriona, que Dieu m’abandonne moi-même si je vous abandonnais !

Elle se serra tout contre moi en guise de réponse.

« Voici, dis-je, l’endroit le plus tranquille que nous ayons rencontré dans cette cité affairée ; asseyons-nous sous cet arbre et avisons à ce que nous pourrions faire. »

L’arbre en question, qui est pour moi inoubliable, se trouvait tout près des quais ; la nuit était noire, mais les maisons étaient éclairées ainsi que les bateaux les plus rapprochés ; d’un côté, c’était la lumière et le bruit de la ville ; de l’autre, l’obscurité et la mer qui bouillonnait.

Je jetai mon manteau sur une pierre de taille et j’y fis asseoir Catriona ; elle aurait voulu ne pas me lâcher le bras, car elle était encore tout émue de la scène du restaurant ; mais j’avais besoin de toute ma présence d’esprit ; aussi je me dégageai, et je me mis à marcher de long en large devant elle à la manière des contrebandiers, me creusant la cervelle pour découvrir une solution.

Tout à coup, il me revint à l’esprit que, dans la hâte du départ, j’avais laissé la note à payer au capitaine Sang. Cela me fit rire, car je trouvais que c’était bien fait. En même temps, d’un mouvement instinctif, je portai la main à ma poche et je constatai qu’elle était vide !

Ce devait être dans la rue où les femmes nous avaient